L'Époque Thinite

Publié le 20 September 2005 (mis à jour le 16 January 2008) par Nico, Francois Daumas

Le nom de la période Thinite (appelée aussi époque archaïque) provient de la ville de Thinis, près d'Abydos, d'où étaient originaires les pharaons la Ière dynastie.

Datation :

L'Époque Thinite s'étend approximativement de ~3150 av J.C. à ~2700 av J.C.

Dynasties :

Ière et IIème dynastie, pour en savoir plus voir l'article : Listes des pharaons

Capitale :

D'abord à Thinis sous la Ière dynastie, elle est délocalisé à Memphis lors de l'unification du pays au début de cette Ière dynastie.

Fait(s) marquant(s) :

Le pharaons Ménès (ou Namer) unifie les Deux Terres. La Haute et la Basse Egypte forment alors l'Egypte. C'est à partir de ce moment que l'ensemble du système égyptien se met en place (administration, religion, ...).

Périodes adjacentes :

La période précédent l'époque Thinite est appelée époque prédynastique et la période la succédant est appelée l'Ancien Empire.

Histoire :

Narmer

Pendant la seconde moitié du IVe millénaire, des cités plus fortes que leurs voisines dominèrent progressivement le pays, et deux royaumes finirent par se constituer, correspondant aux deux parties géographiques distinctes: la haute vallée du Nil et le Delta. Peut-être des unifications éphémères eurent-elles lieu. l'une d'entre elles, sans doute avant le début du IIIe millénaire, eut une importance capitale. Les anciens eux-mêmes l'attribuaient au roi Ménès (qui pourrait être Narmer lui-même), originaire de Haute-Égypte. Il conquit le Delta et, comme c'était un administrateur autant qu'un guerrier, comprenant qu'il aurait de la peine à gouverner les deux pays du fin fond de la Haute-Égypte, il fonda une nouvelle capitale au point de jonction même des deux royaumes. Il lui donna le nom de Mur-Blanc. Cette ville (à l'emplacement de l'actuel village de Mit-Rahina) devait s'appeler plus tard Memphis. Elle demeura la capitale durant tout l'ancien Empire et joua jusqu'à la fin de l'histoire pharaonique un rôle important. À l'époque grecque, c'est encore là que le roi devait se faire couronner selon un rituel antique. Il prenait possession de l'ensemble des territoires en courant autour des quatre bornes, il se conciliait les dieux du Sud et ceux du Nord, puis il coiffait successivement la couronne du Sud, puis celle du Nord, et enfin les deux ensemble, le pschent.

Horus portant le pschent.

De ces temps archaïques on ne connaît guère l'histoire proprement dite. Mais l'archéologie apporte mainte donnée remarquable. Elle nous restitue en particulier les noms des rois appartenant aux deux premières dynasties, qu'il n'est pas toujours facile d'identifier à ceux que nous ont conservés les extraits de Manéthon ou les anciens historiens grecs. Mieux encore, les fouilles nous ont rendu les tombeaux royaux. Jusqu'aux années qui ont précédé la Seconde Guerre mondiale, on situait ces tombeaux dans le désert d'abydos: on y avait trouvé, dans des monuments funéraires très ruinés, des inscriptions et quelques stèles portant des noms de rois appartenant aux deux premières dynasties. La stèle du roi Djet, aujourd'hui au Louvre, en est le plus bel exemple. On pensait que ces souverains s'étaient fait enterrer dans cette région, voisine de la ville de Thinis, parce qu'ils étaient originaires de cette dernière, qui a donné son nom aux deux dynasties dites thinites.

Osiris devient le seigneur d'Abydos Mais, de 1935 à 1956, Emery découvrit au nord de la nécropole de Saqqarah de grands mastabas de la même époque, il les attribua tout d'abord aux personnages importants de la capitale. Puis, on en vint à penser que ces monuments, beaucoup plus grands que ceux d'abydos, étaient des tombeaux des rois eux-mêmes, qui auraient possédé seulement des cénotaphes en Haute-Égypte. Cependant, on a trouvé des fragments humains à Abydos, par exemple un bras (de reine?) avec des bracelets. Il semble que la solution de ce problème réside dans les conceptions religieuses égyptiennes et certaines évidences postérieures. Le complexe funéraire du roi Djéser, à la IIIe dynastie, contient à coup sûr deux tombeaux pour ce seul personnage, et Snéfrou (premier roi de la IVe dynastie) a possédé une pyramide double, contenant deux chambres funéraires, et peut-être même une autre pyramide. Si on rapproche de ce fait les croyances égyptiennes relatives à la personnalité tant humaine que divine, composée d'éléments multiples (baï, ka, akh, chout...), on peut facilement penser que telle partie du corps et le ka, par exemple, étaient enterrées à Abydos, tandis que le reste demeurait à Memphis, près de la capitale. Ainsi, les rois thinites auraient eu deux tombeaux.

Entrée de mastaba, Saqqara

Il n'est pas nécessaire ici d'établir une liste de ces rois, dont l'Ordre est d'ailleurs encore incertain. Mais l'On doit remarquer que l'écriture s'est répandue suffisamment à travers le pays pour permettre une organisation administrative forte. Les inscriptions nous ont conservé les noms de fonctionnaires, chanceliers, trésoriers, magistrats, très probablement déjà contrôlés par un vizir. Souvent deux personnages remplissent la même fonction, un pour le Sud, un autre pour le Nord. L'Égypte connaît alors un essor étonnant. Les rois eux-mêmes rédigent, ou passent pour rédiger, des traités de médecine. Savants, ils sont capables de contrôler les rapports ou les documents administratifs, de vérifier le contenu des ordres écrits, les rentrées des impôts ou l'Organisation des temples. Un incroyable élan guide les arts. À la vieille architecture de poteaux, de clayonnages et de vanneries, se substitue maintenant une construction beaucoup plus solide et une protection plus efficace: le mur de briques crues. Dans la plaine, ces monuments ont disparu, mais les tombeaux de Saqqarah se dressent encore au bord du plateau. Ils étaient peints de vives couleurs, rappelant celles des matériaux primitifs qu'ils remplaçaient, et, parfois, leurs abords étaient munis de décorations prophylactiques, telles ces têtes de taureaux qui ornaient le mastaba du roi Ouadji. La pierre commençait à jouer un rôle dans les parties les plus exposées, comme les escaliers, et surtout pour établir des herses infranchissables dans les galeries conduisant à la chambre funéraire.

La statuaire n'est plus un essai, parfois évocateur, mais encore rudimentaire de l'époque protohistorique: un roi de l'ashmolean Museum d'Oxford, ou encore le Khasekhem du musée du Caire, dénotent une habileté nouvelle à manier des volumes. Le bas-relief en schiste, sur la fameuse palette du roi Narmer , témoigne des conventions qu'on ne trouvait point sur le manche de couteau de Gebel el-Arak. En dépit d'un certain académisme déjà, elles permettent une merveilleuse mise en valeur des qualités esthétiques de l'artiste, la stèle de Djet au Louvre, ou le disque en stéatite avec incrustations multicolores représentant des lévriers chassant la gazelle, témoignent même d'une maîtrise de premier ordre.

Pallette du roi Narmer Face avant Pallette du roi Narmer Face arrière

Palette de Narmer, Face avant et arrière exposée au musée du Caire.

Autant que les rares documents de cette époque permettent de le voir, elle connut une série de créations ou de mises au point étincelantes dans tous les domaines, social, administratif, artistique, intellectuel. Ne connaissant pas assez ce qui précède ni ce qui suit, il est difficile d'en donner des raisons sûres. Il semble bien pourtant que la centralisation, groupant autour du roi, dans la résidence même, toutes les ressources du pays, permettant aux idées de s'interpénétrer, aux oeuvres d'être comparées, donc critiquées, joua un rôle important dans ce développement qui devait aboutir à l'ancien Empire.

Le texte de cet article provient du CD-ROM Encyclopædia Universalis (version 7 parue en 2001).